Du K. Dick, on pensait en avoir ingurgité jusqu'à la nausée : entre les rééditions incessantes, l'exhumation de romans de jeunesse ou non-SF (à quand la publication d'œuvres apocryphes ?), la "transformation" de ses écrits en blockbusters américains (certains réussis, certes) et, suite logique, l'apologie bêlante et aveugle de cet auteur culte par les béotiens… Cela dit, malgré cette "inflation", rendre hommage à un tel écrivain n'était pas gagné d'avance, comme le confie Richard Comballot dans l'avant-propos à son anthologie Dimension Philip K. Dick. Au final, c'est un excellent recueil où près d'une quinzaine d'auteurs français saluent l'écrivain à leur façon. En allant au-delà du simple pastiche, cher à John T. Sladek. En respectant les codes et les thèmes bien connus de ses trames narratives : la mise en cause de la réalité ou son altération, le double, la théorie du complot alimentée par une "paranoïa critique" ou du moins un solide "doute cartésien" (cf. la préface de Xavier Mauméjean, Je pense donc je flippe), etc. Les titres des nouvelles sont autant de clins d'œil aux œuvres du maître (Les clones rêvent-ils de Dolly ? de Richard Canal, Les oubliettes du Haut-Château de Daniel Walther, La Déesse venue du froid d'Alain Dartevelle…) que beaucoup mettent en scène dans leurs "décors truqués" : La dernière valse de Philip K. Dick de Johan Heliot, Parce que mon nom est légion de Jean-Pierre Vernay, Glissement de temps sur Manhattan de Pierre Stolze… Un exercice auquel s'était livré, en grand format, Michael Bishop avec Requiem pour Philip K. Dick (Folio SF).
Laurent Diouf
MCD #48, sept-oct. 2008
Dimension Philip K. Dick, anthologie dirigée par Richard Comballot (Rivière Blanche).