Une histoire qui nous embarque dès les premières lignes tout en développant un climat singulier : c'est le propre de la nouvelle, format dont Gérard Klein vante les mérites en préambule à la réédition de son livre, Le Temps n'a pas d'odeur. Des remarques à asséner férocement aux amateurs de cycles interminables et indigestes : dans un roman, l'auteur se donne l'illusion de constituer tout un univers. Mais dans la nouvelle, l'auteur est contraint en toute subtilité de transférer au lecteur la responsabilité de constituer cette illusion… La nouvelle joue sur des harmoniques, le roman, qui de nos jours tend trop souvent à l'obésité, de la grosse-caisse. La nouvelle vole, le roman échappe rarement dans sa totalité à l'exercice fastidieux, et pas seulement pour son auteur. Les koans zen qui partagent la brièveté des haïkus ouvrent une meurtrière dans l'opacité du réel. Tandis que le réseau de concepts des pavés philosophiques emprisonne leur auteur et parfois leur lecteur… Fort de ces préceptes, on comprend pourquoi il ne noircit que 200 pages pour nous raconter l'odyssée de 7 mercenaires qui, après parachutage temporel, se retrouvent piégés sur une planète hostile sous des dehors paradisiaques…
Laurent Diouf
MCD #24, décembre 2004
Gérard Klein, Le temps n'a pas d'odeur (rééd., Le Livre de Poche)